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 Le chien et le limier

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Sirion Ibn Lahad
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Le chien et le limier EmptyMar 7 Mai 2024 - 16:11
Le chien et le limier 10mw

L'acier s'abattit sur la bûche comme la mort s'abat sur le vieil homme.

Le bois s'effondra. La lame du merlin se releva aussitôt. L'homme attrapa de sa main caleuse une nouvelle bûche et répéta l'opération. Une fois, dix, cent fois. Lorsqu'il se redressa, appuyé sur le manche de son outil et le front maculé de sueur, la matinée s'était envolée. Il chargea les derniers morceaux de bois dans la petite cariole et tira son énième chargement jusqu'à la bâtisse au toit de chaume à quelque pas de là. Il la contourna et s'arrêta sous un appentis afin d'entreposer une nouvelle stère à l'abri des dernières averses printanières.

L'homme s'appuya contre le bois et contempla les alentours. Sa chaumière était au sommet d'une petite colline entourée de bois et de haies. S'il tournait le regard vers le nord, les reliefs de l'Ephel Duath dominaient les hauteurs jusqu'à tutoyer les cieux. Les yeux vers le Levant et le désert menant à Assabia et les terres profondes du Khand le rappelaient à sa vie d'antan. Au sud, d'autres montagnes plus modestes bordant l'Harnen et ses affluents amenaient irrémédiablement le regard vers Arwa et les frontières harado-khandéenne et harondorim. Un carrefour si ce n'est commercial mais du moins brutal et sanglant.

Mais tout cela était bien loin des préoccupations du vieil homme.

Il passa son avant-bras sur son front et descendit la colline, prenant au passage un sac en toile et un couteau bien aiguisé. Il s'enfonça dans le bois, prenant garde à là où il posait les pieds. Il identifia un arbre parmi tous les autres, le contourna et s'y arrêta. Devant lui, un collet au milieu duquel un lièvre mort se trouvait. L'homme écarta la corde en crin. Le lièvre disparut dans son sac. Il remit en place le piège et continua sa route.

À son retour et après cinq pièges relevés, son sac se trouvait garni de deux jeunes lièvres et d'un faisan adulte. Il gravit la colline puis entendit un grognement. Une silhouette à quatre pattes et poilue surgit derrière lui.

- Où étais-tu passé ? grogna à son tour l'homme.

Le rhodesian courut jusqu'à son maître avant d'arrêter son museau humide contre le sac rempli.

- Tu auras ta part, fainéant. Rentrons.

L'homme et son chien passèrent le pas de la porte. Une odeur de bois chaud avait envahi la pièce. L'homme posa son sac sur le plan de travail de sa cuisine après avoir retiré ses bottes crasseuses. Son chien alla se coucher dans son coin habituel, patient. L'homme se mit ensuite en cuisine et prépara le repas. Au bois se mêla bientôt un doux fumet. Tandis que le ragoût chauffait, l'homme prit place dans un large fauteuil aux accoudoirs usés par le temps. Dans les mains de l'homme une assiette creuse remplie d'un mélange de viande. Il déposa l'assiette à ses pieds. Son regard croisa celui de son compagnon, les babines dégoulinantes.

- Copper.

Aussitôt, le chien se rua vers la gamelle à l'évocation de son nom. L'homme observa son ami dévorer son repas, le regard perdu dans ses pensées. Perdu dans cette maison au milieu de nulle part, il avait fini par arrêter de courir. Il avait passé l'âge. Souvent, son esprit lui remémorait le visage de ses garçons. L'un d'eux avait même croisé sa route quelques années plus tôt lorsque, encore naïf malgré son âge, il avait cru pouvoir les retrouver et renouer des liens.

Le hennissement d'un cheval le ramena à la réalité. Copper, lui, avait disparu à ses pieds. Car déjà, son flair de limier l'avait guidé. Le museau posé sur le rebord de la fenêtre. L'homme se leva lentement. Il jeta un regard au mur, près de la cheminée. Son arbalète suspendue était loin d'être prête à l'usage. Il s'appuya contre le mur bordant la fenêtre et risqua un rapide coup d'oeil. Son sang se mit en ébullition, instinctivement, naturellement. Comme si son corps tout entier se remettait soudainement en marche.

Comme si, soudainement, Gyrden revenait à la vie pour affronter une fois encore.. la mort.


#Gyrden



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Le chien et le limier EmptyDim 12 Mai 2024 - 15:12
Les locaux appelaient cet endroit le « carrefour des royaumes ».

Plus récemment, ils l’avaient surnommé le « carrefour sanglant », en raison des intenses combats qui avaient eu lieu dans la région, située sur une voie de communication stratégique entre le Khand et le Harondor sur un axe Est-Ouest, et le Mordor et le Harad sur un axe Nord-Sud. La campagne des Seigneurs Pirates et les velléités guerrières des Khandéens avaient de nouveau enflammé ce point de passage privilégié des caravanes et des armées, qui pouvaient se ravitailler en eau et en vivres le long des rives de l’Harnen, avant de plonger en territoire ennemi pour y porter la guerre ou le pillage.

Le ciel y était pourtant très beau.

D’un bleu azur, qui ne souffrait d’aucun nuage en cette belle et chaude journée. Quelques oiseaux paresseux passèrent vers l’Occident, indifférents aux souffrances et aux ambitions des gens d’ici-bas. La silhouette enturbannée les regarda planer un instant, avant de soupirer de lassitude, et de reprendre sa route vers les collines et les contreforts de l’Ephel Duath. S’éloigner de l’Harnen et des maraudeurs qui y sévissaient était la priorité absolue, et les montagnes offraient une perspective intéressante de pouvoir trouver un peu d’abri.

Une main en visière pour ne pas se laisser aveugler par le soleil, et une autre refermée sur la bride d’un cheval à la jambe blessée, la silhouette allait à pied, la tête rentrée dans les épaules pour lutter contre le vent sec et chaud qui soufflait parfois, et qui charriait le sable du désert au point de rendre l’air irrespirable. Pourtant, elle ne se détournait pas de sa trajectoire, suivant du mieux possible son instinct et les quelques notions de géographie élémentaire dont elle disposait. Remonter vers le Nord jusqu’aux montagnes, puis bifurquer à l’Ouest et marcher en droite ligne le long des Montagnes de l’Ombre, avec une seule pensée en tête : fuir.

Les jours succédèrent aux heures sans que rien ne changeât dans ce paysage maussade. Nul voyageur ne s’aventurait ici en ces temps incertains, et même les animaux semblaient avoir déserté les lieux. Quelques arbres insignifiants poussaient ici ou là, promesse rapidement trahie d’un fruit juteux et sucré qui aurait ravi un estomac vide depuis trop longtemps. Les affres du voyage avaient prélevé leur dû sur la bête et l’humain, qui tous deux semblaient très amaigris, affamés par un périple pour lequel ils n’étaient de toute évidence pas équipés.

Leurs pas étaient de plus en plus lourds, tandis que leurs maigres forces restantes étaient écrasées par la chaleur du soleil qui s’abattait sur leurs têtes dodelinantes.

Ils s’arrêtèrent au dixième soir de leur périple, s’éloignant autant que possible de la route pour se réfugier dans les collines avoisinantes, et se donner une chance d’éviter les mauvaises rencontres. Le cavalier à pied, comme à son habitude, tomba son turban et démêla ses épais cheveux auburn d’une main experte. Beaucoup se seraient étonnés de voir une femme voyager seule et sans armes dans une région aussi dangereuse, et ils n’auraient pas eu tort de la mettre en garde pour les risques qu’elle encourait ainsi. Les bandes de pillards et de maraudeurs s’enrichissaient souvent en réduisant en esclavage les voyageurs inattentifs, et Amalia avait certainement le profil pour constituer une cible de choix.

Le chien et le limier Amalia10

Cette belle jeune femme, dont l’apparence et la tenue indiquaient clairement qu’elle appartenait culturellement à la sphère d’influence du Gondor, avait les traits fins et doux de ceux qui n’ont pas grandi dans la pauvreté et l’affliction, même si une ombre semblait peser sur ses frêles épaules, discernables dans ses yeux trop souvent effrayés. Sa valeur sur le marché des esclaves d’Assabia était considérable. Le tatouage qu’on avait imprimé violemment sur son épaule le lui rappelait quotidiennement. Amalia n’était pas prête à affronter la route et la faim, mais elle était terrifiée et désespérée, ce qui lui donnait assez d’élan pour continuer son chemin. A en juger par les précautions qu’elle prenait pour se cacher, et par la fréquence à laquelle elle regardait par-dessus son épaule, on pouvait d’ailleurs deviner qu’elle fuyait quelqu’un… ou quelque chose. Cette même chose qui avait creusé une profonde entaille dans la cuisse de sa monture.

La blessure avait été traitée de manière sommaire par quelqu’un qui ne s’y connaissait guère, mais qui avait souhaité bien faire. Elle était en train de s’infecter, et le pauvre animal devait souffrir à chaque pas. Amalia retira le pansement de fortune, et utilisa l’eau de son outre pour nettoyer et assainir un peu la plaie. Cela devrait faire l’affaire en attendant. Puis, terrassée par la fatigue, elle s’installa à même le sol et s’endormit presque aussitôt, sans même prendre le temps d’allumer un feu pour se réchauffer.

Le lendemain matin fut, inévitablement, particulièrement pénible.

Elle avait reconstitué ses précieuses réserves d’eau en traversant le fleuve, mais cela faisait presque cinq jours qu’elle n’avait rien avalé, et le moindre effort lui coûtait terriblement. Elle soupira, en comprenant que son projet de rallier les montagnes d’une seule traite échouerait lamentablement, si elle ne trouvait pas un endroit où faire halte avant. Lorsque le soleil fut assez haut, elle prit la direction de la colline la plus élevée des alentours, et observa autour d’elle. Il lui fallut un moment pour repérer, derrière le petit bois, une forme trompeuse qui pouvait ressembler à une formation rocheuse anodine, mais qu’elle supposa en réalité une maison abandonnée.

Son choix fut arrêté dès qu’elle la vit.

Elle quitta donc la route principale, qui connectait deux pôles plus ou moins civilisés, pour créer son propre sentier à travers les herbes hautes et les fossés, en ligne droite vers cette bâtisse dans laquelle elle plaçait ses espoirs. La demeure se trouvait loin de tout, et assez bien cachée pour ne pas attirer l’attention de bandes hostiles en maraude, lesquelles gagnaient mieux leur vie en surveillant les grands corridors commerciaux où ils pouvaient rentabiliser leurs entreprises militaires. Cependant, Amalia comprit bien rapidement qu’elle n’arriverait jamais à destination.

A chaque mètre gagné, la maison semblait reculer d’autant, et demeurer perpétuellement hors de portée. Le relief vallonné compliquait singulièrement son parcours, qui l’obligeait à prendre de longs détours pour éviter des formations rocheuses où ni elle ni sa monture ne pouvaient se faufiler. Et dès lors qu’elle atteignait un nouveau sommet, il lui semblait que la maison était encore plus loin que précédemment.

« C’est forcément un mirage », songea-t-elle.

Cette pensée, d’abord fugace, s’installa progressivement dans son esprit, et y sema un doute dévastateur qui consuma ses forces plus sûrement qu’un poison. Ses ultimes forces l’abandonnèrent bientôt, et elle s’écroula à genoux, terrassée par l’épuisement, trop faible pour pleurer ou crier. Elle se contenta seulement de lever les yeux au ciel, et de supplier les Valar :

- Pitié… Pitié…

Nul ne vint la sauver, et elle s’écroula face contre terre, incapable de lutter plus longtemps…


~ ~ ~ ~


Lorsque Gyrden sortit de chez lui, il tomba nez-à-nez avec un invité inattendu, au visage allongé et aux grands yeux craintifs. Le cheval solitaire, encore sellé et harnaché, avait trouvé son chemin jusqu’à sa demeure, mais il portait la promesse de quelque chose de plus sombre et de plus menaçant. En partie parce qu’une telle vision ne pouvait qu’évoquer la guerre et le malheur, mais également parce que la bête elle-même portait une large blessure qui semblait avoir été soignée assez récemment.

C’était un hongre du Khand, plus petit que ceux de l’Ouest, mais parfaitement adapté au climat et au paysage local. Sa selle portait de jolis motifs orientaux comme on en voyait parfois dans les clans les plus superstitieux, même si celle-ci ne portait aucune indication à caractère religieux. On pouvait seulement y lire une devise qui se répétait en boucle : « nous faisons les princes ». Le cheval ne portait ni provisions ni équipement de guerre, mais dans une sacoche, soigneusement plié, se trouvait un document d’une valeur tout à fait extraordinaire.

Une carte cryptique, qui ne ressemblait à aucune autre, et qui indiquait la présence d’un trésor enfoui.

Le document était cependant fragmentaire, et n’indiquait pas dans quelle région de la Terre du Milieu il fallait chercher. Il pouvait toutefois être déchiffré par un spécialiste, peut-être un érudit de Minas Tirith, ou bien un sage arnorien. Il y avait fort à parier que des hommes influents pouvaient se battre pour mettre la main sur un tel objet.

Gyrden était maintenant en possession de la carte, d’une monture boiteuse, et d’une piste sanglante à remonter pour trouver à qui appartenaient l’une et l’autre… et peut-être résoudre le mystère qui entourait cette arrivée fortuite sur son domaine.

#Amalia


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Le chien et le limier EmptyJeu 16 Mai 2024 - 16:33


La porte de la masure s'ouvrit dans un silence de cathédrale. Le regard méfiant et les gestes assurés, Gyrden examina les environs. Après quelques secondes, il avança lentement vers le hongre. Le bras tendu dans sa direction et sa paume vers le ciel, il  rassura l'animal. D'un claquement de langue, il ordonna à Copper de ne pas sortir de la bâtisse, au risque d'effrayer leur visiteur. Bien qu'étant arrivé jusqu'ici, le hongre resta méfiant et prêt à déguerpir. Gyrden remarqua les inscriptions sur la selle et surtout la robe de l'animal. En tant que fils du Khand, cette race il ne la connaissait que trop bien. Aussitôt, il se mit à murmurer dans la langue du désert. L'animal cessa de s'agiter et bientôt Gyrden put se saisir des rênes. Il flatta son encolure de longues minutes pour le mettre en confiance.

Gyrden leva les yeux. Cet animal ne pouvait pas s'être approché de chez lui ainsi, seul, sans qu'on ne l'ait guidé dans cette direction. Autrement dit, son propriétaire était sans doute là, tout près. Et au vu de l'état du hongre, il y avait fort à parier que ce propriétaire était mort. Ou près à le devenir.

L'homme emmena le cheval dans l'arrière cour, l'attacha et lui donna un peu de foin et un seau rempli d'eau de son puits. Il prit enfin le temps d'étudier la blessure et le travail de boucher fait pour la soigner. Puis il se risqua à ouvrir la sacoche de selle. Gyrden tenta de comprendre ce qu'il tenait entre les mains, puis voyant que ça ne le mènerait à rien, il replia la carte et la rangea dans sa tunique.

Gyrden retourna à l'intérieur, se rendit dans son cellier et sortit un coffre de sous l'établi. Il l'ouvrit. Ses doigts effleurèrent le long fourreau brun. Des odeurs l'envahirent comme revenus du passé.

*Tout sera bientôt derrière nous. Bientôt, je rangerai cette épée dans un placard et nous pourrons vivre loin de tout ça, mon amour.*

Copper s'approcha de son maître et frotta sa truffe contre son bras. Gyrden passa une main entre les oreilles du molosse.

Puis il souleva l'arme. Il la fixa à un ceinturon autour de sa taille.

- Cop.

Le chien suivit les pas de son maître et tous deux s'élancèrent vers le bas de la colline en quête de réponses. Avec l'aide de Copper, Gyrden eut tôt fait de remonter la piste. Et comme il l'avait pressenti, le cavalier gisait face contre terre, immobile. En s'approchant, il s'avéra que le cavalier était une femme. Gyrden mit un genou au sol et l'examina rapidement. Il chercha ses armes pour éloigner tout risque mais il n'en trouva aucune. Gyrden s'arrêta, accoudé sur son genou. Une femme, seule, sans arme, à cheval, ici. Et blessée. Il se demanda s'il ne s'agissait pas d'une mauvaise blague. Ou d'un dangereux coup fourré.

* * *

Quelques heures plus tard, Amalia parvint à ouvrir un oeil. Cela faisait bien longtemps qu'elle ne s'était pas réveillée dans un lit convenable.

La petite chambre où elle se trouvait n'était éclairée que par quelques bougies. Par la fenêtre, elle distingua les étoiles et les contours de quelques arbres proches. De l'autre côté, une porte ouverte menait à la pièce principale de l'habitation. Une douce odeur enivra bientôt les sens de la jeune femme. Gyrden était affairé en cuisine. Le feu brûlait dans l'âtre. Et Copper dormait devant les flammes.

Dormait. Car lorsque Amalia se risqua à passer une tête, les yeux perçants du rhodesian attendaient déjà de distinguer la jeune femme. L'animal resta allongé, ses yeux couleur sable plongés dans ceux d'Amalia. Après des secondes qui lui parurent une éternité, leur échange silencieux fut interrompu par Gyrden qui se retourna, loin d'être surpris de la voir. Les manches relevées et un tablier de cuir devant la poitrine, il marmonna dans sa barbe tout en jetant un regard vers les pieds de son invitée.

- Parfois, je me dis que je devrais faire quelque chose pour ce parquet qui grince... et des fois, je me dis que c'est pas plus mal ainsi.

Gyrden quitta son plan de cuisine, deux larges bols en main. Il les déposa sur la table. Un à chaque extrémité. D'une main, il invita Amalia à s'asseoir. Le bol fumait. L'on devinait des morceaux de viande et des légumes flottants au milieu de la soupe. Copper, aussi gourmand qu'il fut, n'avait d'yeux que pour l'intrus. Amalia lui jeta un dernier regard. Gyrden s'appuya sur le dossier de sa chaise.

- Que faites-vous ici ?

La voix de Gyrden s'était subitement durcie.

- Je n'ai pas pour habitude de recevoir de la visite. C'est là ce qui m'a poussé à m'installer à cet endroit. Étant donné les circonstances, j'estime être en droit de savoir. De tout savoir.

Copper se releva. La gueule fermée, la queue droite.

- Que faites-vous ici ? répéta-t-il.



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Le chien et le limier EmptyHier à 9:29

La nuit s’était engouffrée dans la chambre telle une voleuse, dérobant le peu de chaleur que la modeste maison avait pu accumuler durant la journée, et tirant un frisson timide à la jeune femme étendue sur le lit. Amalia ouvrit un œil paresseux, et pendant un instant, tout lui sembla parfaitement normal. La douceur relative d’un oreiller sous sa tête, son corps qui s’enfonçait négligemment dans un matelas, la quiétude d’un foyer d’où se dégageait une l’odeur agréable d’un repas qu’on préparait. Elle s’attendait presque à pouvoir entendre les rires d’enfants qui couraient à l’extérieur, et le chant d’une lingère mettant les draps à sécher.

L’odeur de la lessive propre lui manquait.

Terriblement.

Ses yeux clairs s’ouvrirent un peu plus, laissant pénétrer dans ses iris la lueur blafarde de la lune et des étoiles. Au dehors, les arbres lui parurent différents de ceux de sa jeunesse… Plus austères, plus menaçants, aussi. Des doigts effilés et griffus qui se balançaient à l’orée de sa prison, comme une muraille l’empêchant de percevoir l’horizon et l’espoir de retrouver sa vie. Elle se redressa sur un coude, s’étourdissant presque de ce simple effort. Ses pieds nus et incertains trouvèrent maladroitement le sol, et elle s’assit pour observer le monde dans le bon sens.

Une chambre.

Une pièce étroite et boisée au mobilier rustique et simple, qui ne ressemblait en rien à l’endroit où elle avait passé ses plus belles années… ni d’ailleurs à l’endroit où elle se souvenait s’être effondrée. Le passé lui revint en mémoire comme si une digue s’était soudainement rompue, laissant jaillir dans son esprit le flot ininterrompu d’images, de sons et de sentiments que sa conscience malmenée avait vainement tenté de condamner à l’oubli. La fuite. La faim. Le froid. La douleur. La peur. Surtout la peur. Des larmes se mirent à couler le long de ses joues… Elle ignorait où elle était, et ne savait pas si son cauchemar était terminé ou s’il ne faisait que commencer.

Pour l’heure, elle était libre de ses mouvements, mais rien n’indiquait qu’elle n’était pas prisonnière. Elle entrevit le bougeoir en fer qui reposait sur la table, et décida qu’il ferait l’affaire. L’empoigner lui coûta terriblement, presque autant que de le brandir comme une masse tandis qu’elle se levait et s’approchait de l’unique porte. Derrière, elle percevait quelques bruits. Quelqu’un s’affairait, cuisinant sans doute un met fameux tant l’odeur lui mettait l’eau à la bouche. Sa faim dévorante la poussait presque à se jeter sans réfléchir dans ce qui était peut-être un piège, car la perspective de mourir de faim si proche de son salut lui était insupportable. Mais sa raison gardait encore quelques flammèches de lucidité, et elle se résolut à faire preuve de prudence.

Elle savait ce qu’il en coûtait de baisser la garde.

Sa prudence et sa supposée discrétion ne suffirent pas à tromper la vigilance de la sentinelle quadrupède qui veillait sur la porte. L’animal, quoique allongé et calme pour l’instant, lui sembla immense et terrifiant. Ses grands yeux sombres qui ne cillaient pas fixaient la jeune femme avec un mélange de curiosité et de méfiance qui l’effrayèrent. Elle voulut reculer, mais la voix gutturale de son hôte la figea sur place. L’homme était encore plus effrayant que la bête qui l’accompagnait. Grand et puissant, le visage mangé par une barbe épaisse et des sourcils broussailleux, il avait l’air tout droit sorti d’un conte pour enfants, où il incarnerait le péril mortel, l’homme sauvage vivant reclus dans une caverne, d’où il ne sortait que pour dévorer les imprudents.

Le visage d’Amalia blêmit.

Elle regarda bêtement ses pieds. L’idée de pouvoir terrasser cet homme à l’aide d’un bougeoir lui parut brusquement saugrenue, et elle resta là, incapable de parler, incapable de lui répondre. Il la terrifiait si profondément et si absolument qu’elle peinait presque à respirer. Des images d’une rare violence lui revinrent en mémoire. Son corps figé, pétrifié, ne lui obéissait plus.

Il fallut le choc des bols contre la table en bois pour la ramener à la réalité, lui tirant un sursaut qu’elle ne parvint pas à camoufler. Tendue à l’extrême, elle jetait des regards pas assez discrets tout autour d’elle, pour évaluer ses possibilités. Une porte, qui semblait donner vers l’extérieur, se trouvait derrière l’homme barbu qui semblait aussi infranchissable que les monts de l’Ephel Duath. C’était sa seule chance de quitter cet endroit, mais pour aller où ? Elle ignorait où se trouvait son cheval, et l’idée de fuir au milieu de la nuit dans une région qu’elle ne connaissait pas n’était guère rassurante. Et puis il y avait le bol.

La perspective d’un repas tira à son ventre affamé une plainte pathétique.

Elle leva machinalement le bras qui tenait le bougeoir, maintenant l’objet pointé vers son invité comme s’il s’était agi d’une épée brandie avec laquelle elle aurait pu le terrasser. Même dans ses rêves les plus fous, cette perspective semblait stupide. Ce bougeoir, toutefois, incarnait sa seule perspective de résister à ce que cet inconnu voudrait lui infliger. Il commença par l’interroger, la clouant sur place de quelques mots prononcés sur un ton si dur et si cassant qu’elle manqua de se briser sur place. Amalia avait depuis longtemps dépassé ses propres limites, et elle ne tenait debout que par miracle. Elle leva sa seconde main, et raffermit sa prise sur le bougeoir.

L’inconnu la pressa davantage.

Le chien se leva.

La jeune femme se sentit soudainement acculée, et son premier réflexe aurait été de battre en retraite, si la douce odeur qui se dégageait du bol ne l’attirait pas inexorablement. Le dilemme était insoluble, mais elle finit par ouvrir la bouche pour apaiser la colère de son hôte et lui fournir quelques éléments de réponse… En vain.

Son regard, son attitude, cette force incontrôlable qui se dégageait de lui… Elle fut submergée par un mélange de craintes anciennes et actuelles, que renforçait encore son état d’épuisement généralisé. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine, son sang semblait bouillir dans ses veines, tandis que ses yeux écarquillés ne parvenaient pas à traduire autre chose qu’un effroi incommensurable. Sa bouche, toutefois, fut incapable de produire le moindre son, et elle sentit à cet instant qu’elle ne pourrait plus jamais parler.

Il y eut d’abord une larme solitaire.

Suivie de sa sœur.

Puis elle se mit à pleurer franchement, et succomba à des sanglots déchirants. Cela faisait trop même pour une personne aussi courageuse et résiliente qu’elle l’était. Toutefois, même alors que ses émotions la submergeaient, elle ne quittait pas l’homme des yeux. Son regard anéanti lui criait par-dessus la table qu’elle était terrifiée, et qu’elle ne voulait pas qu’il lui fît du mal, mais ses mains tremblantes toujours levées lui indiquaient également qu’elle ne se rendrait pas à lui sans livrer une ultime bataille de laquelle elle espérait ressortir morte ou triomphante.


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